Chronique de trois mois de bouleversements
Dialogue numéro 32 – Introduction
Début septembre en Cisjordanie ont eu lieu les plus grosses manifestations depuis la première Intifada de 1987. Dans les premières manifestations, les membres des services de sécurité de l’Autorité Palestinienne étaient ceux qui criaient le plus fort pour canaliser le mécontentement contre le premier ministre Salam Fayyad, cherchant à créer une diversion pour contenir le mouvement protestataire naissant. Cependant, très vite, les plus larges masses se sont jointes aux manifestations, se sont engouffrées dans ce mouvement, le chargeant de leurs revendications contre la vie chère, les privations, le harcèlement quotidien à la fois des forces israéliennes d’occupation et de la police de l’AP. Dès lors, le contenu des mots d’ordre changeait et progressivement, les langues se déliaient. Dans les manifestations, on entendait les revendications contre les accords d’Oslo (constitutifs de l’Autorité palestinienne, instituant la répression des palestiniens par d’autres palestiniens pour le compte des troupes d’occupation) se généraliser. L’État d’Israël débloquait une aide de 250 millions de shekels (50 millions d’euros) — somme provenant des produits palestiniens taxés par l’État israélien —, les États-unis, les pays du Golfe mettaient immédiatement la main à la poche… Fallait-il à tout prix empêcher une généralisation des revendications politiques ?
Le 21 octobre, les élections municipales en Cisjordanie, avec une participation d’à peine 50%, marquaient un pas supplémentaire dans le rejet du Fatah et de la direction de l’Autorité palestinienne profondément corrompue et suppléante avérée des forces d’occupation israéliennes. Dans le même temps, l’émir du Qatar visitait Gaza à l’invitation du Hamas. Pour le Qatar — et personne ne saurait en douter — cette visite n’était pas le produit d’un sursaut d’humanisme face à la désagrégation de la Bande de Gaza et à l’extrême précarité de sa population. Dénoncée par l’ensemble des autres partis politiques comme une tentative d’ingérence pour le compte des États-unis, la présence de l’émir n’a pas suscité d’enthousiasme dans la population de Gaza, en dehors des militants du Hamas eux-mêmes.
Lancée le 14 novembre, l’offensive israélienne contre la population de la bande de Gaza se soldera au bout de six jours par la mort de 163 palestiniens, dont une majorité de civils, femmes, enfants et 1235 blessés. S’agissait-il de punir le peuple palestinien ?
Le 29 novembre, Mahmoud Abbas, président non élu de l’Autorité palestinienne, avec le soutien de plusieurs pays européens, dont la France déposait une motion devant l’assemblée générale des Nations Unies et obtenait un vote majoritaire sur la reconnaissance d’un
État de Palestine
au statut précaire. S’agissait il de sauver l’Autorité palestinienne ?
Dès le lendemain, l’État d’Israël annonçait la construction de 3000 logements supplémentaires en Cisjordanie. N’est ce pas là une expression de ce qu’est le sionisme ?
Résistance et répression pour le peuple palestinien ; perspective permanente de nouvelles guerres pour les populations juives largement conditionnées par une propagande implacable... Une question se pose : comment faire en sorte de dégager une perspective commune, démocratique, fondée sur la reconnaissance des mêmes droits pour toutes les composantes qui vivent aujourd’hui, de manière profondément imbriquée, sur tout le territoire historique de la Palestine ? Les articles publiés dans ce numéro de Dialogue ne donnent-ils pas des éléments de réponse ?
Sommaire :
- page 4
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Chronique de trois mois de bouleversements
Par François Lazar - page 5
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Le vote à l'ONU pour reconnaître la Palestine légitime un statu quo raciste
par Joseph Massad - page 7
- Natan Blanc, 19 ans, de Haïfa refuse de faire son service militaire dans les « Forces armées d'Israël »
- page 8
- Une lettre sur la bande de Gaza « Le monde ne peut pas assister sans réagir aux frappes mortelles qui pleuvent sur la Palestine. »
- page 10
- Discussion avec Evelyn Hecht Galinski, fille de l’ex-président du « Conseil central des juifs » (Zentralrats der Juden), Heinz Galinski
- page 11
-
Les Palestiniens et le
Printemps arabe
Par Hanane Shehadeh - page 16
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Note de lecture : Après le sionisme, un seul Etat pour Israël et la Palestine.
Par Sam Ayache - page 23
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Les Palestiniens ont besoin d’une solution à un seul État.
Par Ghada Karmi - page 25
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« La condition d’un seul Etat : Occupation et Démocratie en Israël/Palestine.» Extrait.
Par Ariella Azoulay et Adi Ophir - page 28
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Les Palestiniens et les Israéliens unis contre le sionisme d’apartheid.
Interview-discussion avec Ralph Schoenman