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Le n° 22 de Dialogue vient de paraître (Janvier 2009)

Introduction

Aujourd’hui un Palestinien de 60 ans n’a jamais rien connu d’autre que l’exil ou l’occupation. L’écrasement sous les bombes de la Bande de Gaza, peuplée à 70% de réfugiés et de descendants de réfugiés, pour la plupart originaires des villes et villages de la côte méditerranéenne, montre que la Nakba (la  catastrophe  en arabe) qui a démarré avec l’expulsion massive et violente de 800 000 Palestiniens en 1948, n’est pas terminée. Pour les dirigeants sionistes, elle doit être effacée de l’histoire. Lors des cérémonies commémorant le 60ème anniversaire de l’État d’Israël, Tzipi Livni, qui sait parfaitement que les Palestiniens ne renonceront jamais à leurs droits, avait déclaré que  tant que les Palestiniens n’auront pas banni le mot Nakba de leur vocabulaire, il n’y aura pas de cession de territoire.  La Nakba n’est pas un souvenir, c’est une menace permanente démarrée il y a soixante ans, et à laquelle est intrinsèquement reliée la revendication du droit au retour.

Le chaos actuel n’est-il pas inscrit depuis 1947, date du vote de la partition de la Palestine par l’ONU, puis par la création d’un État d’Israël, fondé sur la base d’une gigantesque spoliation ? La situation actuelle était inscrite dès le départ et elle le sera tant que l’injustice profonde créée par la Nakba n’aura pas été réparée.

 Pas en notre nom !  Face à cette barbarie, qui s’abat depuis 22 jours (à l’heure où nous écrivons) sur la Bande de Gaza ; face à ces images atroces d’enfants déchiquetés sous des bombes américaines larguées par l’armée israélienne, c’est dans un rapport sans précédent que dans le monde entier des voix de militants, intellectuels, universitaires, hommes politiques d’origine juive crient leur profonde indignation. En Israël même, aux cris de  arrêtez la tuerie, cessez le feu et levée du siège maintenant  à plusieurs reprises, des milliers de juifs ont manifesté pour refuser que cela soit fait en leur nom. Dans le même temps, dans tous les villages de Galilée, c’est par dizaines de milliers, malgré une répression sans précédent, que les palestiniens de l’intérieur manifestaient leur soutien à leurs frères de Gaza, marquant par là même l’unité du peuple palestinien.

Lisons le témoignage de Sir Gerald Kaufman, Membre du Parlement Britannique :

« Mes parents sont venus en Angleterre en tant que réfugiés de Pologne. La plupart des membres de leur famille ont été par la suite assassinés par les nazis lors de l’Holocauste. Ma grand-mère était malade et alitée lorsque les nazis sont venus chez elle à Staszow. Un soldat allemand la tua dans son lit. Ma grand-mère n’est pas morte pour permettre aux soldats israéliens d’assassiner des grands-mères palestiniennes à Gaza. Le gouvernement israélien actuel exploite de manière impitoyable et cynique la culpabilité entretenue parmi les non-juifs du massacre de juifs pendant l’holocauste, pour justifier l’assassinat de Palestiniens...

Sur Sky News, il y a quelques jours, la porte-parole de l’armée israélienne, le major Leibovich, a été interrogée à propos du nombre de morts résultant de l’intervention israélienne, qui se montait alors à 800 Palestiniens—le total a maintenant atteint les 1000. Elle répliqua immédiatement :  500 d’entre eux étaient des activistes.  C’est là la réponse d’un nazi. Je suppose que les Juifs qui combattaient pour leur vie dans le ghetto de Varsovie pouvaient être désignés comme des activistes…

Quel que soit le nombre de Palestiniens que les Israéliens assassineront à Gaza, ils ne pourront résoudre ce problème existentiel par des moyens militaires. Dès que les combats cesseront, par quelque manière que ce soit, il y aura toujours 1,5 million de Palestiniens à Gaza et 2,5 millions en plus en Cisjordanie. Ils sont traités comme des chiens par les Israéliens, avec des centaines de barrages routiers et les ignobles résidents des implantations

Il est temps pour notre gouvernement de préciser au gouvernement israélien que sa conduite et sa politique sont inacceptables et d’imposer un embargo total des armes vers Israël. Il est temps de faire la paix, mais une paix véritable, pas une solution imposée par la conquête, ce qui est le véritable but d’Israël, mais qu’il lui est impossible de réaliser. Ce ne sont pas seulement des criminels de guerre, ils sont fous ».

Que l’on partage ou pas les positions politiques de Gerald Kaufman, on ne peut que saluer une telle déclaration. Nous posons ici à nouveau la question : quelle est la solution démocratique à même d’en finir avec toutes ces destructions ?

La démonstration n’est-elle pas faite à nouveau que la  solution  des deux États, ouverte par la partition de la Palestine, ne saurait apporter une réponse aux peuples de la région ?

Nous publions dans ce numéro quelques unes des centaines de prises de position émanant de ces groupes, militants, écrivains, intellectuels juifs qui, par l’existence même de leurs protestations montrent que la politique totalitaire et sanguinaire menée par les dirigeants de l’État d’Israël contre le peuple palestinien va à l’encontre des intérêts de tous les peuples de la région, y compris des populations juives.

L’organisation  Courage to refuse  , qui regroupe de jeunes israéliens qui refusent d’être membres de l’armée d’occupation, vient de publier un document condamnant le meurtre de centaines de civils palestiniens et appelant les soldats à refuser de se battre dans Gaza :  La violence brutale et sans précédent à Gaza est atroce. Le faux espoir que cette sorte de violence apportera plus de sécurité aux Israéliens est à plus forte raison dangereux. Nous ne pouvons rester passifs alors que des centaines de civils sont en train d’être massacrés par l’armée israélienne. 

C’est un même cri horrifié qui provient de ces hommes et femmes exerçant leur activité dans diverses organisations de l’ONU, comme l’OCHA, l’UNRWA. En contradiction complète avec la ligne développée par cette organisation, dont le rôle depuis 60 ans a essentiellement visé à faire endosser la politique américaine par le monde entier, ces fonctionnaires, médecins, bénévoles, témoins directs de la destruction physique de centaines d’enfants, de femmes, d’hommes pour la simple raison qu’ils sont Palestiniens, sont eux-mêmes devenus les cibles de la barbarie d’État israélienne.

La dernière opération militaire israélienne, intitulée  Plomb durci  est très nettement la plus barbare de toutes : par le nombre de victimes, dont plus de 80% sont des civils, par l’étendue des dévastations, par la froideur cynique de ceux qui la justifient.

Deux États ? Revendiquer deux États implique de répondre à plusieurs questions : que deviendront les  citoyens arabes  d’Israël, dont les partis viennent de se voir interdire de participer aux prochaines élections législatives à la Knesset ? Que deviendront les millions de réfugiés ? Que penser des propositions évacuant le règlement démocratique de la question des réfugiés ?

Les faits parlent d’eux-mêmes. La politique de l’État d’Israël qui vise, par tous les moyens, à faire renoncer les Palestiniens à leurs droits, montre que cet État n’est que l’instrument d’une politique qui défend des intérêts bien particuliers, et certainement pas ceux de l’immense majorité des populations juives.

Ces prises de position ne renforcent-elles pas le combat démocratique pour le droit inconditionnel au retour des populations palestiniennes, chassées et martyrisées par des guerres et répressions incessantes ?

En dialoguant dans cette revue, militants arabes et juifs de Palestine ne montrent-ils pas qu'une issue existe ? Ces faits ne démontrent-ils pas que l’issue positive est, répétons-le, une Palestine libérée de l’oppression sioniste et impérialiste, avec des droits égaux pour les populations juives

Et si, pour tous les peuples, la première des priorités, c’est l’arrêt immédiat des bombardements israéliens et la levée du blocus, n’est-il pas temps, pour précisément mettre fin durablement à cette tragédie humaine, d’amorcer un débat entre démocrates, militants ouvriers, pour rechercher ensemble, dans le respect mutuel, la solution à même de mettre fin à toutes les discriminations, de consacrer l’égalité et donc de jeter les bases de la paix et de la démocratie véritables ?


Sommaire :

p.2
Introduction
p.5
Halte à l'agression ! Cessez le feu maintenant !
Appel de 27 organisations juives et arabes dans l'État d'Israël
p.6
Les massacres à Gaza par Salah Salah
p.10
Quelques réflexions sur Gaza par Miko Peled
p.13
Une lettre ouverte de jeunes juifs et juives anti-sionistes au Canada
p.15
Le soulèvement du ghetto de Gaza par Mazin Qumsiyeh
p.17
Où la paix pose problème par Haim Bresheeth
p.20
La solution Texane par Ben Adam
p.22
L'échec politique du Forum civil Euromed (Marseille 3-4 Novembre 2008)
Par Amir Makhoul
p.25
Le pogrom d'Acre, qui doit s'excuser ? Par Nizar Abou Ahmed

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